Crise au Soudan : flambée de violence à Khartoum

Mercredi 9 Aout 2023

L'armée soudanaise a intensifié mardi ses efforts pour progresser dans Khartoum, donnant lieu à des affrontements parmi les plus violents depuis le début, en avril dernier, d'un conflit avec une faction militaire rivale qui a accentué la crise humanitaire dans le pays.


Depuis lundi, ont rapporté des témoins, l'armée du général Abdel Fattah el Bourhan mène des frappes aériennes et utilise de l'artillerie lourde dans le but de prendre le contrôle d'un pont sur le Nil dont les Forces paramilitaires de soutien rapide (FSR) se servent pour acheminer renforts et munitions depuis deux villes adjacentes à la capitale - Omdurman et Bahri.
Les FSR du général Mohamed Hamdan Dagalo, connu sous le nom de "Hemedti", ont répondu vigoureusement à l'offensive de l'armée pour conserver leur avantage territorial à Khartoum, qu'elles contrôlent en grande partie depuis que le conflit a éclaté, le 15 avril.

Cela a donné lieu à de violents affrontements dans des quartiers résidentiels de la capitale, faisant des victimes parmi les civils et contraignant des habitants à fuir.
D'après des activistes basés à Omdurman, au moins neuf civils ont été tués. Un habitant a déclaré à Reuters par téléphone que la situation était "terrifiante" dans la ville située sur l'autre rive du Nil.

"Coups de feu, artillerie lourde, frappes aériennes (...) Il y a des bombardements dans toutes les directions", a dit Nader Abdullah, 52 ans.
Le conflit entre l'armée et les FSR, alliées lors du coup d'Etat de 2021, a éclaté après des tensions croissantes entre leurs commandants sur les contours de la transition vers un régime civil, quatre ans après la chute d'Omar el Béchir.
Si les deux camps ont revendiqué des progrès ces derniers jours, aucune avancée décisive n'a été constatée.
Les efforts menés par l'Arabie saoudite et les Etats-Unis pour parvenir à un cessez-le-feu sont dans l'impasse.

Plus de quatre millions de personnes ont été déplacées, selon des données de l'Onu, dont plus de 900.000 ayant fui vers des pays voisins déjà secoués par des conflits et des crises économiques.
Ces violences ont également donné lieu à des attaques ethniques perpétrées par des milices arabes et les FSR dans l'ouest du Darfour.
Elles ont aussi amplifié la crise humanitaire dans le pays, où plus de 300 décès liés à des maladies et à la malnutrition, principalement parmi les enfants en bas âge, ont été répertoriés entre le 15 mai et le 17 juillet, d'après l'agence onusienne pour les réfugiés.

L'arrivée des pluies saisonnières a alimenté les craintes que les maladies d'origine hydrique se répandent davantage.
A Khartoum, les infrastructures et services gouvernementaux, notamment de santé, se sont effondrés. Les coupures d'eau et d'électricité sont multiples, tandis que les denrées alimentaires manquent et que les FSR se livrent à des pillages.
"Aucun camp n'est capable de l'emporter, et ce que nous entendons d'eux dans les médias est le contraire de ce qu'il se passe sur le terrain", a déclaré Mohamed Usher, habitant du sud de Khartoum âgé de 37 ans.
"Que reste-t-il de toute façon à remporter à Khartoum ? Les institutions sont détruites, les universités, les marchés, tout est détruit", a-t-il déploré.
Reuters